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IFI 2024 : comment évaluer les parts de SCI ?

La loi de finances pour 2024 a modifié le mode d’évaluation des parts de société détentrice de biens immobiliers taxables à l’impôt sur la fortune

IFI 2024 : comment évaluer les parts de SCI ?

Annabelle Pando il y a 11 jours - @Droit et Affaire

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IFI 2024 : comment évaluer les parts de SCI ?
MicroOne/AdobeStock

La loi de finances pour 2024 a modifié le mode d’évaluation des parts de société détentrice de biens immobiliers taxables à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Les dettes contractées par la société et qui ne sont pas afférentes à des actifs imposables ne sont plus déductibles. L’associé redevable de l’IFI peut appliquer un correctif pour éviter que les nouvelles règles conduisent à retenir une valeur des titres supérieure à leur valeur vénale.

Les redevables de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) doivent déclarer les biens et droits immobiliers ainsi que les actions et parts de sociétés détentrices de biens immobiliers taxables pour leur fraction représentative de biens immobiliers imposables détenus directement ou non.

Distinguer les biens taxables, les biens exonérés et les biens exclus de l’IFI

Tous les biens immobiliers détenus par une SCI ne sont pas imposables à l’IFI. Certains d’entre eux peuvent bénéficier d’une exonération d’IFI au titre des biens professionnels. C’est le cas des biens affectés à l’activité professionnelle exercée à titre principale du dirigeant. Des conditions relatives à la fonction de direction et la rémunération du dirigeant sont par ailleurs exigées. D’autres biens ou droits immobiliers sont dits hors champ de l’IFI, c’est-à-dire qu’ils en sont exclus. C’est le cas des participations minoritaires : les parts ou actions de sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, représentant moins de 10 % du capital et des droits de vote sont exclus de l’IFI.

C’est aussi le cas des biens immobiliers affectés à une activité opérationnelle :

• les biens affectés à l’activité opérationnelle de la société qui les détient,

• les biens détenus par une filiale et affectés à l’activité prépondérante opérationnelle de la société mère,

• les biens détenus par une société mère opérationnelle et affectés à l’activité opérationnelle d’une filiale contrôlée par la société mère,

• les biens détenus par une filiale et affectés à l’activité d’une autre filiale contrôlée.

L’évaluation des parts de SCI

Les associés de la société sont imposés sur une fraction de la valeur de leurs titres représentative des biens immobiliers détenus directement et indirectement par la société. Dans un premier temps, ils doivent donc évaluer leurs titres. À cette valeur, ils appliqueront ensuite un ratio immobilier, pour ne tenir compte que des actifs immobiliers imposables /Actif brut réévalué de la société. La valeur des titres est égale à la valeur vénale des actifs sociaux après déduction du passif. L’IFI porte en effet sur la valeur nette des biens immobiliers. En cas de détention en direct le redevable peut ainsi déduire différentes dépenses :

• Les dépenses d’acquisition de biens ou droits immobiliers imposables comme un emprunt bancaire,

• Les dépenses de réparation ou d’entretien et charges de copropriété effectivement supportées par le propriétaire et non encore réglées au 1er janvier ;

• les dépenses d’amélioration, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement ;

• les impositions liées à la propriété (taxe foncière, taxe sur les locaux vacants…) et l’IFI théoriques.

Toutes les dettes ne sont pas déductibles

Pour les biens détenus à travers une société, la prise en compte du passif est plus complexe. Surtout, la loi de finances pour 2024 vient de la durcir (Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, JORF n° 0303 du 30 décembre 2023). Une première catégorie de dettes est exclue depuis 2018, date de la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en IFI. Il s’agit de dettes qui auraient pu avoir été contractées de façon abusive pour minorer la valeur des titres. Sont ainsi ciblés les emprunts souscrits par une société contrôlée par un redevable pour lui acheter un bien ; les prêts consentis à la société par l’associé lui-même, ou par un membre de son foyer fiscal ou encore de son groupe familial (ascendants, descendants, frères et sœurs). Pour ces opérations, la déduction n’est possible qu’à la condition que le redevable démontre que l’opération ne poursuit pas un objectif principalement fiscal.

À partir de cette année, les redevables ne peuvent plus déduire les dettes qui ne sont pas liées aux biens taxables à l’IFI, comme c’était le cas jusqu’à la déclaration d’IFI 2023. La loi de finance pour 2024 a cherché à rétablir une équité entre les passifs que les propriétaires de biens en direct peuvent déduire et ceux que les propriétaires de biens à travers une société peuvent déduire. La distorsion entre ces règles pouvait aboutir à une imposition des biens détenus via une société moins élevée que celle des biens détenus en direct. Désormais, les dettes non afférentes à un actif taxable ne sont plus déductibles pour la valorisation des titres de la société. L’article 973, IV, du CGI le prévoit en ces termes : « Pour la valorisation des parts ou actions mentionnées au 2° de l’article 965, ne sont pas prises en compte les dettes qui sont contractées directement ou indirectement par un organisme ou une société et qui ne sont pas afférentes à un actif imposable ».

Exemple

La SCI détient un patrimoine immobilier de 2 millions d’euros et un compte titres de 1 million d’euros. À son passif, un crédit de trésorerie de 1 million d’euros.

La première étape consiste à évaluer tous les biens immobiliers et non immobiliers figurants à l’actif de la société pour déterminer l’actif brut. Ici, il est de 3 millions d’euros.

La deuxième étape consiste à déduire les seuls passifs afférents aux biens immobiliers et non visés par les dispositifs anti-abus. Ici, la société n’a pas de passif immobilier. L’actif reste bien à 3 millions d’euros. Ensuite, il convient d’appliquer à la valeur ainsi obtenue le ratio immobilier (égal au rapport entre la valeur des actifs immobiliers et le total de l’actif brut). Ici, le ratio immobilier est de 66,66 % (2 millions d’euros ÷ 3 millions d’euros). Appliqué à la valeur des parts (3 millions d’euros), il conduit à une valeur des parts à déclarer pour l’IFI 2024 de 2 millions d’euros. Si la SCI est détenue à parts égales par deux associés, la participation de chacun s’élève à 1 million d’euros.

En vertu des règles antérieures qui se sont appliquées jusqu’en de 2023, la valeur des parts pour l’IFI aurait été inférieure à 1,33 million d’euros, car il aurait été possible de déduire le crédit de trésorerie à l’actif.

La possibilité d’appliquer un correctif

Toutefois, l’application de ces nouvelles règles peut aboutir à calculer un IFI sur une base de valeur des titres supérieure à leur valeur vénale. Pour éviter cet écueil, la loi prévoit un correctif en permettant au redevable de plafonner la valeur des titres à retenir dans l’assiette de l’IFI à la valeur la plus faible entre :

– la valeur vénale des titres,

– la valeur vénale des immeubles déduction faire des dettes y afférentes.

Selon l’article 973, IV, du CGI, « Sans préjudice des II et III du présent article, la valeur imposable à l’impôt sur la fortune immobilière des parts ou actions déterminée conformément au premier alinéa du présent IV ne peut être supérieure à leur valeur vénale déterminée conformément au I ou, si elle est inférieure à cette dernière, à la valeur vénale des actifs imposables de la société diminuée des dettes y afférentes qu’elle a contractées, à proportion de la fraction de capital de la société à laquelle donnent droit les parts ou actions comprises dans le patrimoine du redevable ». En cas d’application du plafonnement, c’est la plus faible de ces deux valeurs qui constituera la valeur imposable à proportion du capital détenu par le redevable.

Exemple

Si la SCI détient, cette fois-ci, a un patrimoine immobilier de 2 millions d’euros, un compte titres de 1 million d’euros, mais a pour passif un crédit immobilier de 1 million d’euros, le ratio immobilier est toujours de 66,66 % (2 millions/ 3 millions), et la valeur des parts pour l’IFI est de 1 333 333 euros (2 millions d’euros × 66,66 %).

En 2023, cela aurait été la valeur à déclarer. En 2024, compte tenu de la possibilité d’appliquer un correctif de plafonnement, il est en effet possible de comparer le résultat obtenu soit à la valeur vénale des droits sociaux, soit à la valeur des immeubles figurant à l’actif, nette des dettes immobilières et de retenir la plus faible. Ce deuxième terme de comparaison est à privilégier, puisqu’il aboutit à une valeur à déclarer à l’IFI inférieure à 1 million d’euros (2 millions d’euros d’actif immobilier -1 million d’euros de crédit immobilier). Si la SCI est détenue à parts égales par deux associés, la participation de chacun s’élève à 500 000 euros.

Application d’une décote

Il est possible d’appliquer sur la valeur obtenue, une décote de 10 % pour détention indirecte et aussi d’une décote de 10 % pour absence de liquidité des titres de sociétés non cotées, en fonction de l’existence de clauses statutaires limitant la disposition des parts type, clause d’agrément.